Quand on lit « Eduquer à l’émerveillement » de B. Humbeek, on ne peut que se souvenir d'éléments qui nous avaient interpellés d’une conférence donnée dans nos murs par Olivier Hamant. Croiser les concepts qu’il développe et illustre grâce au vivant et l’idée d’éduquer à l’émerveillement (selon Bruno Humbeeck), c’est ouvrir un espace pour repenser l’éducation dans un monde incertain. Plusieurs éléments de leur discours respectifs se font écho et prennent de ce fait encore davantage de relief.
Voici quelques pistes de rapprochement qui me viennent à l’esprit et que j’espère intéressantes à partager.
Un premier élément qui se fait jour est l’idée que ces
positions sont « l’affaire de tous » et pas « un truc de
spécialistes ». Chez l’un comme chez l’autre, il s’agit d’une faculté que
nous avions et que nous avons progressivement perdue. Le biologiste insiste sur
le fait que la nature a gardé cette faculté de s’adapter à des conditions
incertaines, le pédagogue démontre que tous les enfants disposent de ce
potentiel d’émerveillement à la naissance.Il n'y a rien à acheter ou à produire : on l'a au fond de nous.
Il y a pleins d’autres éléments qui nourrissent cette comparaison riche de réflexions. Parlons seulement
De la notion d’écosystème : l’individu est un être vivant dans un monde vivant. On ne peut pas considérer l’éduquer sans considérer la richesse du contexte. C'est aussi une manière de considérer l’intérêt d’utiliser la nature comme environnement d’apprentissage (oui, au-delà de « M’sieur, il fait beau on fait cours dehors ? »:-))
Du rapport au temps et l’intérêt de ralentir,
de prendre le temps de…, de découvrir, de s’imprégner, des creuser une idée sans
foncer sur la solution la plus efficiente.Et qui sait, tomber sur un truc on n'aurait jamais pensé si ce loisir ne s'était pas ouvert...
De la valorisation de la curiosité, cultiver la créativité en variant les formes des solutions trouvées à un problème, en variant la forme des productions attendues. Cela passe aussi par des formes d’expression qui ne sont pas forcément technologiques, par forcément habituelles.
Alors oui, bien sûr, ces idées sont séduisantes. Mais aux enseignants embarqués dans des exigences de volume d’informations à transmettre, de nécessité de diplômer, de répondre à des normes, d’avancer dans un programme, elles peuvent légitimement sonner comme de douces utopies ou comme des injonctions qui compliquent encore davantage la vie. Pourtant, sans faire la révolution, on pourrait dès aujourd’hui réfléchir à des intégrations possibles. Rien que pour les 4 seuls points mentionnés ici, tirer parti, pour certains apprentissages choisis, de la force de l’ "école du dehors » au sens large, la possibilité de transposer une série de découvertes « sur le terrain ». C'est tout le champ des "field studies". A propos du temps et de la variété des formes d’expression, il devrait être possible de réduire certains points de matière (qui d’ailleurs seront probablement vite obsolètes) au bénéfice de savoir-faire méthodologiques assez universels, et qui pourraient s’exprimer sous des formes écrites, graphiques, musicales, orales… Ici encore, ce ne sont que des idées « générales » mais ce serait chouette de pouvoir partager, ici peut-être, des fiches d’activités de différentes disciplines, valorisant des approches résolument orientées vers une pédagogie (plus) robuste.
Pour s’y encourager, on pourrait dès demain simuler une panne d’électricité, qui rendrait par exemple notre sacro-saint PowerPoint soudainement inutile…
A vos partages chers collègues !
Oui, la panne d'électricité anti-powerpoint nous pousserait vers la fragilité ou l'anti-fragilité (voir mon post sur Taleb). On y trouverait une prise de risque, peut-être proportionnée et donc convoyeuse de croissance. Oui donc, mais sans doute pas à tous les cours !